• Investir en formation: payant?

    Au niveau macro-économique les économistes ont maintes fois démontré l’impact du niveau moyen d’éducation des travailleurs sur le niveau de productivité d’un pays et, ainsi, sur le niveau de vie moyen de ce pays.

    Par contre, au niveau micro-économique, entreprise par entreprise, le rendement des investissements en formation est plus difficile à démontrer.

     

    Un environnement exigeant

    En partant il faut réaliser que l’environnement concurrentiel des entreprises est de plus en plus exigeant en terme de compétences des travailleurs:

    » Les changements technologiques accélèrent l’obsolescence des connaissances acquises (dans les domaines scientifique et industriel on parle d’un taux de demi-vie de moins de sept ans). 

    » L’omniprésence, en particulier, des TI et son rythme rapide d’évolution imposent des réapprentissages continus. 

    » Le vieillissement démographique pose, en plus, le défi du transfert des connaissances et de l’appropriation des savoirs explicites par la nouvelle génération de travailleurs. 

    » Enfin, l’accent mis sur l’innovation vient encore accroître le besoin de formation. Le processus menant à l’innovation requière un capital humain de haut niveau, niveau qui peut être amélioré par la formation. 

     

    Les PME à la traîne  

    Heureusement les gouvernements ont rapidement reconnu ces défis et mis en place divers incitatifs. On connaît tous la fameuse loi dite du 1% au Québec (Loi 90), laquelle oblige les entreprises (avec une masse salariale de plus d’un million de dollars) à investir annuellement au moins 1% de cette masse; ailleurs au Canada on trouve divers crédits d’impôts.

    Quel fut le résultat de ces efforts. Malheureusement pas aussi bons qu’on l’aurait voulu. Encore une fois les PME sont à la traîne (rappelons que 98% des entreprises canadiennes ont moins de 100 employés). Selon des données récentes de Statistiques Canada, à peine plus de la moitié des lieux de travail offrent de la formation. Par contre, plus la taille d’une entreprise est élevée et plus grande est la probabilité qu’elle offre de la formation:

    » c’est le cas de plus de 90% des moyennes et grandes entreprises; 

    » mais de seulement 45% des PME. 

     

    Mais est-ce payant?

    Grosso modo on peut distinguer deux types de formation:

    » celle formelle, en classe; 

    » et celle en cours d’emploi. 

    Des recherches récentes (article dans La Presse de M. Benoît Dostie de l’Institut d’économie appliquée, HEC Montréal) ont démontré une augmentation de 10% de la productivité chez les employés ayant reçu de la formation en classe au cours des douze mois précédents.

    Par contre on a noté aucun impact pour la formation en cours d’emploi. Les hypothèses avancées sont que la formation en classe apporte une augmentation significative des connaissances, alors que la formation en cours d’emploi ne sert surtout qu’à initier les nouveaux employés, en cas de roulement du personnel.

    10% d’augmentation de la productivité c’est significatif! Selon les montants investis dans le processus de formation, cela peut se traduire par un retour sur l’investissement de l’ordre de 50 à 100%.

     

    Et il ne s’agit que d’un minimum puisque ces données ne sont basées que sur les impacts facilement mesurables (e.g. la productivité dans l’accomplissement d’une tâche). La formation peut avoir un impact sur un ensemble d’autres facteurs importants pour l’entreprise, par exemple la qualité des produits, la satisfaction de la clientèle, la créativité, etc.

     

    Mesurer les impacts

    La difficulté de mesure se présente à deux niveaux:

    » Mesurer l’amélioration; 

    » Mesurer la contribution de la formation à cette amélioration. 

    À cet égard il est utile de mettre en place trois processus de mesure de la performance d’un programme de formation:

    » Une mesure de la satisfaction des participants avec l’activité de formation. C’est l’évaluation standard faite à la fin de chaque activité. Elle mesure si les participants sentent que leurs attentes ont été satisfaites. Cependant même des participants satisfaits pourraient ne rien appliquer de ce qu’ils ont appris. C’est pourquoi il faut, au minimum, assurer un deuxième niveau de mesure 

    » Quelque temps après l’activité de formation (de quelques jours à quelques mois selon la nature et la complexité de l’apprentissage) il faut mesurer ce que les participants ont retenu et, surtout, appliqué. Qu’est-ce qui a changé concrètement dans la façon dont les participants accomplissent leurs tâches? Cela peut prendre, par exemple, la forme d’un bref test de rétention (sur les concepts) ou d’observation (des méthodes de travail). Selon ce qui est alors noté on pourra mettre en place certaines activités de coaching, ou de formation de renforcement. 

    » Mais, même si les participants ont effectivement mis en application leurs apprentissages, est-ce que cela a eu des impacts positifs sur les résultats de l’entreprise. C’est ce qui est e plus important, et le plus difficile, à évaluer. Il n’y a pas façon unique de faire cette évaluation — créativité et imagination sont requises. 

     

    Complémentarité des actions

    Un dernier point important à prendre en considération est celui de la complémentarité des investissements. Il soulève l’avantage, pour les entreprises, d’entreprendre des programmes d’actions complémentaires et cohérentes, plutôt que des initiatives individuelles, éparpillées, à la pièce.

    En effet, il semblerait (cela a été peu étudié) que les rendements sont plus importants lorsque des investissements complémentaires sont fait simultanément. Par exemple lorsqu’un investissement en capital physique (machinerie, équipement ou TI) s’accompagne d’un investissement parallèle en formation (le cas des projets ERP étant un exemple typique).

    À cet égard, on peut se questionner sur la pertinence et l’efficience des programmes et subsides gouvernementaux qui ciblent isolément des pratiques individuelles, plutôt que des actions simultanées (une préoccupation qui était d’ailleurs présente à l’origine de la Mesure d’appui à la productivité du MDEIE).

     

    Source:  Benoit Dostie, Institut d’économie appliqué, HEC Montréal 

     

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